"Ici les clients viennent manger Marseille" : après la mythique "Epuisette", la cheffe Coline Faulquier fait le pari de la rénovation culinaire avec "Auffo"

Coline Faulquier, cheffe du restaurant Auffo au Vallon des Auffes, Marseille

Après la polémique qui a entouré la fermeture de l'Epuisette, institution mythique du Vallon des Auffes à Marseille, la cheffe Coline Faulquier sert ce vendredi 25 avril ses premiers clients dans un restaurant totalement rénové. Un pari.

Pour la première fois en plusieurs jours, elle s'est assise. Un luxe. La cheffe saisit l'opportunité de l'entretien pour reprendre son souffle. Pour toute l'équipe de Auffo, nouveau restaurant du Vallon des Auffes qui succède à l'Epuisette, les dernières semaines ont eu des airs de longue plongée en apnée ; les cernes sous les yeux trahissent les nuits largement raccourcies, un marathon afin d'être au rendez-vous de la grande ouverture. La cheffe avoue sans gloire : "je n'ai pas vu mes enfants depuis une semaine".

Un marathon pour ouvrir à temps

Habituée des défis à relever, Coline Faulquier n'a pas lésiné dans le challenge. Le 31 mars, elle était encore derrière les fourneaux de son restaurant étoilé Signature, au cœur de Marseille. Toujours propriétaire du lieu rebaptisé Luciole, celle qui se donne à 300 % à sa nouvelle aventure y prodigue encore des conseils avisés à une équipe de salariés passionnés.

Cheffe, patronne, maman... je tente de faire coïncider toutes mes vies.

Coline Faulquier, cheffe du restaurant Auffo

Ouvrir Auffo en quatre mois ? C'était impossible, nous l'avons fait" se réjouit Coline Faulquier, avec une pointe de fierté. La mise en place en cuisine, les premiers essais en salle se sont déroulés en pleins travaux. Les derniers éléments de décor sont arrivés en début de semaine.

Un restaurant redessiné pour s'adapter au décor naturel

L'ancien restaurant l'Epuisette a été largement remanié, un travail de titan pour les architectes du cabinet Ateliers A+. Du bois, de la pierre, une palette de couleurs pastel vert et brun qui rappellent la roche blanche du vallon, les algues. Et se marient avec le décor grandeur nature de la Méditerranée et des îles du Frioul qui s'offre tel un spectacle à chacun des convives.

"Nous avons choisi des matériaux bruts, une ambiance intimiste et épurée, mais en évitant le cliché de l’intérieur d’un bateau" explique la cheffe, associée dans le projet avec un groupe de tourisme du Gard, The Social Club. Jusque dans la tenue du personnel de salle, qui a troqué le traditionnel noir et blanc pour un beige plus adapté.

Douze tables, une vingtaine d'employés

Dans l'espace en enfilade de l'ancien Epuisette, institution mythique du Vallon, Coline Faulquier n'a conservé que douze tables, pour une capacité de 35 couverts midi et soir. "Nous tenions à ce que chaque table soit au plus près de la mer, afin que tous nos convives soient en vibration directe avec la scénographie naturelle".

Côté cuisine, la plupart des employés secondaient déjà la cheffe dans son ancien restaurant Signature et l'ont suivie. "Ils sont à mes côtés dans cette nouvelle aventure, ça me conforte dans mes valeurs. Le collectif n'a pas de prix, je me vois comme une cheffe d'orchestre".

Le collectif, c'est mon ADN. Je me vois comme une cheffe d'orchestre".

Coline Faulquier, cheffe de Auffo

Quelques salariés de l'ancienne Epuisette sont également au rendez-vous de cette grande ouverture du nouvel établissement. Ceux qui ont fait le choix de rester, ils ne sont pas nombreux. Coline compte sur son savoir-faire de dix ans pour recréer ici une nouvelle équipe stable. Malgré les turbulences des derniers mois.

Les stigmates de la polémique

Choisie par la métropole Aix-Marseille-Provence pour prendre la suite de l'Epuisette, Coline Faulquier reste marquée par les attaques personnelles dont elle a été la victime. Pétition, pressions, insultes sur les réseaux sociaux. "Ça a été dur. Très dur."

Les gérants précédents éconduits avaient leurs fervents défenseurs. La cheffe les côtoyait au sein du petit monde de la gastronomie marseillaise. Elle n'a aujourd'hui plus de contact.

On a jeté l'opprobre sur moi, je l'ai très mal vécu.

Coline Faulquier, cheffe du restaurant Auffo

"Heureusement mon équipe de l'époque m'a épaulée, ainsi que mes proches". Concentrée sur sa nouvelle aventure, Coline s'efforce à présent de rester à distance de la polémique. "C'est derrière à présent". En espérant que le recours juridique déposé par anciens gérants ne vienne pas enrayer son ambition pour Auffo.

La course à l'étoile

Aux termes du contrat passé avec la métropole, Coline est installée pour dix ans. Mais la cheffe compte plutôt en mois.

Avec un objectif chevillé à ses casseroles : retrouver l'étoile Michelin qu'elle a abandonnée en quittant son ancien restaurant. " Peut-être dès l'an prochain, si on y arrive. On sait ce qu'on vaut, on l'a prouvé. Le travail et l'abnégation qu'on y avait mis, on ne l'a pas abandonné". D'autant que la cuisine plus fonctionnelle du nouvel établissement offre de nouvelles conditions de créativité.

Un beau défi pour cette Bourguignonne d'origine qui a passé son enfance dans le Vaucluse. Et qui a mis toute son énergie à gravir les échelons du métier. D'abord la Pergola il y a dix ans dans les quartiers Nord de Marseille. Puis l'ouverture de Signature, et l'étoile arrachée en 2021. Et maintenant cette consécration au Vallon des Auffes.

Mon restaurant au Vallon des Auffes, c'est un rêve de gosse

Coline Faulquier, cheffe de Auffo

Réussir, pour satisfaire l'exigence des clients

Sur les tables, les daurades du Vallon tutoient le safran de Provence et les arômes de pastis artisanal. En partenariat avec les producteurs locaux et régionaux, la Cheffe de Auffo fait le pari du "Manger Marseille".

Le "menu bouillabaisse" de l'Epuisette est toujours à la carte, mais a été largement rénové pour refléter la modernité de Coline Faulquier, et son goût pour les "saveurs corsées".

Ici, les clients viendront 'manger Marseille'.

Coline Faulquier, cheffe du restaurant Auffo

Dans ce nouveau challenge, l'exigence est le maître mot : "Je suis exigeante avec les autres, car très exigeante avec moi-même. Nous devons être ensemble à la hauteur de l'exigence que les clients ont vis-à-vis de nous."